Les producteurs de café vous racontent
Derrière chaque tasse de café que nous savourons, il y a l’empreinte indélébile d’un producteur. Ces hommes et femmes, souvent à des milliers de kilomètres de nos cafetières, jouent un rôle capital dans la détermination de la saveur, de l’arôme et même de la texture du café que nous consommons.
D’abord, c’est la connaissance intime du sol et du climat qui permet au producteur de choisir la variété de caféier la plus adaptée à sa plantation. Les techniques de culture, la rotation des cultures, la lutte intégrée contre les parasites ou encore la méthode d’irrigation sont autant de décisions prises par le producteur et qui influencent directement la qualité du grain récolté. De plus, la diversité des cafés dans le monde, des robusta corsés aux arabicas délicatement parfumés, est le fruit direct des choix et des pratiques des producteurs. Par exemple, le processus de fermentation, que ce soit par voie sèche ou humide, peut radicalement changer le profil gustatif du café. C’est également la main experte du producteur qui détermine le moment optimal pour la récolte, assurant que chaque cerise de café est cueillie à sa maturité parfaite.
En outre, dans un monde où la monoculture devient de plus en plus prédominante, nombre de ces producteurs s’efforcent de préserver la biodiversité du café, cultivant des variétés anciennes ou rares, souvent plus résilientes et offrant des saveurs uniques.
En somme, chaque décision prise par le producteur, de la graine à la cerise, a une répercussion directe dans notre tasse. C’est leur expertise, leur passion et leur dévouement qui nous permettent de découvrir et d’apprécier la richesse et la diversité du café. En valorisant leur travail, nous honorons non seulement leur savoir-faire, mais nous assurons également la pérennité d’un café de qualité et varié pour les générations futures.
Éthiopie : Muluemebet Emiru
L’Éthiopie, souvent considérée comme le berceau du café, a vu naître une figure féminine marquante dans le monde du café : Muluemebet Emiru. Dans une société où la production de café était traditionnellement dominée par les hommes, Muluemebet a brisé des barrières socioculturelles en devenant la première femme africaine à obtenir une licence pour produire du café.
Née dans une période de transformations sociales, Muluemebet s’est retrouvée confrontée à de nombreux défis. Les préjugés sur le genre étaient profondément ancrés, et l’idée qu’une femme puisse gérer une plantation de café semblait inconcevable pour beaucoup. Mais grâce à sa détermination et à sa passion pour le café, elle a non seulement réussi à obtenir cette licence tant convoitée, mais elle a également prospéré dans cette industrie, produisant des cafés de qualité exceptionnelle qui sont rapidement devenus recherchés.
Sa contribution unique ne s’est pas arrêtée à sa propre plantation. Reconnaissant l’importance de l’autonomisation des femmes, Muluemebet a activement œuvré pour l’inclusion des femmes dans toutes les étapes de la chaîne de valeur du café. Elle a créé des formations, encouragé des coopératives dirigées par des femmes et a été une fervente défenseure des droits des travailleuses du café. Sa vision progressiste a largement contribué à façonner une nouvelle ère pour la communauté caféière éthiopienne, où les femmes, aujourd’hui, jouent un rôle beaucoup plus actif et reconnu.
Muluemebet Emiru est ainsi devenue une source d’inspiration non seulement pour les femmes éthiopiennes, mais aussi pour les productrices de café du monde entier. Sa légende perdure, rappelant à chaque génération l’importance de la persévérance, de l’innovation et de l’égalité des sexes dans le monde du café.
Kenya : Samuel Kamau
Le Kenya, pays d’Afrique de l’Est, est reconnu mondialement pour son café de haute qualité, notamment grâce à ses régions caféières bénéficiant d’altitudes élevées, de sols volcaniques fertiles et d’un climat idéal pour la culture du caféier. Les régions du mont Kenya, de Nyeri, de Kirinyaga ou encore de Nakuru, pour n’en nommer que quelques-unes, sont des terroirs emblématiques qui produisent certains des cafés les plus prisés au monde.
Samuel Kamau est l’un de ces héros méconnus qui a contribué à l’essor de la caféiculture kenyane. Né dans une famille modeste, Samuel a commencé sa carrière comme simple travailleur agricole dans une grande plantation de café. Observateur et passionné, il a rapidement acquis des connaissances sur la culture, la récolte et le traitement des grains de café. À force de persévérance et d’ingéniosité, Samuel a pu, après plusieurs années, acquérir sa propre parcelle de terre et y fonder sa plantation.
Mais Samuel ne s’est pas contenté de reproduire les méthodes traditionnelles. Conscient des enjeux environnementaux et de la nécessité d’innover pour améliorer la qualité du café, il a introduit plusieurs innovations et pratiques durables dans sa plantation. Par exemple, il a adopté des méthodes d’irrigation économes en eau, mis en place un système de compostage pour recycler les déchets organiques et a opté pour des variétés de caféiers plus résistantes aux maladies. En outre, Samuel a été l’un des pionniers dans la région à promouvoir la fermentation anaérobie, une méthode de traitement du café qui accentue la clarté et la complexité des saveurs dans la tasse.
Grâce à sa vision avant-gardiste et à son engagement en faveur de la durabilité, Samuel Kamau est devenu une référence dans la communauté caféière kényane. Sa success story inspire aujourd’hui de nombreux jeunes agriculteurs, leur rappelant que, quelles que soient les origines, avec passion et dévouement, on peut transformer les traditions et laisser une empreinte durable dans le monde du café.
Brésil : Lúcia Maria da Silva Dias
Le Brésil est indéniablement le géant du café sur la scène internationale, étant le plus grand producteur mondial de cette précieuse denrée depuis plus de 150 ans avec un culture du café riche en histoire et diversifiée. Les vastes régions de Minas Gerais, d’Espírito Santo et de São Paulo sont le cœur battant de cette production, avec des plantations s’étendant à perte de vue sous le soleil brésilien.
Au milieu de cette immense toile caféière, Lúcia Maria da Silva Dias se distingue comme une étoile brillante. Originaire d’une petite ville du Minas Gerais, Lúcia a vu, enfant, les effets de la monoculture du café sur les sols et les écosystèmes locaux. Adulte, elle s’est érigée en défenseure ardente de l’agroforesterie et de la biodiversité, plaidant pour une vision du café qui va au-delà de la simple rentabilité.
En combinant caféiers avec d’autres cultures et arbres dans un même espace, Lúcia a démontré que l’agroforesterie non seulement préservait la santé des sols et augmentait la biodiversité, mais améliorait aussi la qualité du café brésilien produit. Son approche, centrée sur l’écologie, favorise la résilience face au changement climatique et aux maladies des plantes.
Son travail n’est pas resté inaperçu. Lúcia a été invitée à partager son expertise à travers le monde, lors de conférences internationales, de formations et de symposiums. Ses grains, produits de manière éco-responsable, ont été applaudis et recherchés par des torréfacteurs du monde entier, gagnant plusieurs prix pour leur qualité exceptionnelle et leur caractère unique.
Lúcia Maria da Silva Dias est la preuve vivante que la production de café à grande échelle et le respect de l’environnement ne sont pas mutuellement exclusifs. Grâce à sa vision et à sa persévérance, elle a redéfini ce que signifie produire du café au Brésil, influençant une nouvelle génération de producteurs soucieux de la terre et de la tasse.
Guzman Vargas : Une vie dédiée à l’or brun de Colombie
Dès sa tendre enfance, Guzman Vargas a été bercé par le doux parfum du café, se laissant inspirer par les gestes ancestraux de sa mère et de son grand-père. Une vocation est née. Fort de sa formation d’ingénieur agro-industriel, Guzman s’est plongé avec passion dans cet univers, accompagné aujourd’hui par sa femme et son fils, gardiens de cette riche tradition familiale.
La rosée du matin n’a pas encore disparu lorsque Guzman déguste sa première tasse de café à 5 h. Ce rituel immuable précède la distribution des missions quotidiennes, soumises aux aléas climatiques. À 6 h, son équipe est déjà à pied d’œuvre, prête à affronter les challenges du jour, qu’il s’agisse de la récolte, de la protection des cultures ou de la plantation. Une pause bien méritée à 8 h leur permet de reprendre des forces avant de replonger dans le labeur jusqu’à 17 h. Chaque période de l’année apporte son lot de défis, avec deux moments phares : la récolte de Mitaca entre mai et juillet et la grande moisson de fin d’année. Pour Guzman, le café ne se résume pas à une simple boisson. C’est un engagement, une responsabilité envers sa communauté. À travers sa plantation, El Mirador, il aspire à offrir des opportunités d’emploi, tout en mettant en avant le savoir-faire colombien sur la scène internationale.
Il y a de cela 16 ans, Guzman osait rêver. On le traitait de visionnaire, voire d’excentrique, quand il évoquait ses méthodes innovantes de fermentation. Pourtant, mû par sa passion et ses recherches personnelles, il a persévéré. Il se remémore les nuits blanches, les innombrables échantillons analysés et l’excitation des découvertes. Désormais, fort d’outils modernes et d’installations optimisées, Guzman continue de repousser les limites de l’art caféier, mêlant tradition et modernité, dans sa quête constante d’excellence.
Un faux producteur, mais une vrai légende du Café Colombien
Dans la fin des années 1950, face à une crise due à une surabondance de l’offre mondiale de café, la Fédération nationale des producteurs de café de Colombie (Fedecafé) sollicite des agences de publicité internationales. L’agence américaine DDB, gagnante en 1959, crée le personnage emblématique Juan Valdez, représentatif du café colombien, toujours accompagné de sa mule, Conchita, sur fond d’Andes. La campagne débute en 1960 avec une annonce dans le New York Times, générant un succès international fulgurant. Aujourd’hui, soixante-dix ans après, Juan Valdez demeure l’icône du café colombien, rivalisant en popularité avec des figures comme Shakira. Ce succès publicitaire est salué pour sa capacité à distinguer un produit autrement jugé similaire aux autres.
L’icône publicitaire Juan Valdez a été incarnée par divers acteurs réels au fil des années. D’abord joué par Jose F. Duval, le rôle est ensuite repris par le caféiculteur colombien Carlos Sanchez de 1969 à 2006. Après sa retraite, un casting exigeant cherchait un remplaçant correspondant à un profil précis de « paysan travailleur et dévoué ». Carlos Castañeda, de la région d’Antioquia, a été choisi pour représenter le « caféiculteur colombien type ». Aujourd’hui, le personnage est moderne, utilisant les réseaux sociaux, tout en continuant d’endosser le rôle emblématique de promotion du café colombien pour près de 500 000 producteurs. Son image apparaît sur le logo de 3500 marques validées par la Fédération des producteurs de café colombien.